Tu
n'y arrives jamais depuis la pensée.
Pars toujours de la conscience,
de ce trou en toi, de cette vacance en toi,
de cette absence.
Et même
'en toi' est de trop.
Tu te rends compte très vite que cette absence
est toi.
Que cette absence de toi révèle cette ultime présence.
Est ultime présence.
Cet accueil.
Cette ouverture, totale, absolue,
qui naît de l'absence.
Dans cette absence,
tu vois que la
fenêtre est toi déguisé en fenêtre,
tu vois que le chat est toi déguisé en
chat,
tu vois que tout ce que tu vois est toi
déguisé en cette multitude
d'objets,
dans un flux unique,
dans une totale continuité.
Dès que c'est identifié par les
mots, c'est étiqueté, c'est séparé,
et bien souvent c'est évalué.
Mais c'est uniquement le langage et la pensée
qui font cela.
C'est uniquement ajouté sur ce qui est, surimposé.
En deçà de cette couche très superficielle,
de cette surface des
mots et du langage,
de ce vernis du monde,
du rêve du monde,
duel, fait d'opposés,
en deçà, il y a
toute cette profondeur de l'être,
ce miracle de l'absence
d'étiquetage,
donc de l'absence d'ego.
Tu n'es plus ce corps auquel
tu t'es identifié si souvent.
En fin de compte, tu réalises que ce
que tu étais profondément
ne s'est jamais identifié à quoi que ce
soit
et ne pourra jamais s'identifier à quoi que ce soit.
Que le
chercheur est le cherché.
L'identification, la recherche, la souffrance apparente,
tout cela
n'était, n'a jamais été
qu'un jeu en surface,
juste à la surface
de l'être,
sans aucune conséquence possible, réelle.
Toute la
souffrance du monde demeure sans conséquence aucune
sur l'être
profond,
sur le flux réel de la Vie,
sur le flux du réel conscient,
qui échappe totalement à l'espace, au temps, à la causalité,
à
l'étiquetage des pensées, à la séparation.
Il ne peut y avoir le
Soi d'un côté et le non-Soi de l'autre,
sinon le Soi est encore un
objet,
et « on prend les enfants du bon moi pour des non-moi
sauvages »,
comme disait Stephen Jourdain !
Reste
juste dans ce qui est,
dans le réel.
Dans ce merveilleux,
cet
insondable silence de ce qui est.
Et d'où toutes les musiques
surgissent alors
librement,
dans un miracle perpétuel.
Sans que
jamais ce silence ne soit affecté par la musique,
par le bruit,
par
l'apparent bruit qui est lui-même musique.
Alors la musique de
Mozart est génialement Mozart,
et la musique du marteau-piqueur est
génialement marteau-piqueur.
Le marteau-piqueur, évalué comme un
morceau de Mozart, n'est pas forcément réussi... mais pour un
morceau de marteau-piqueur, c'est parfaitement réussi !
De même
pour toute émotion, pour toute pensée,
pour tout ce qui apparaît
dans le flux de la conscience.
Tout est toujours parfaitement à sa
place,
parce que ce n'est jamais qu'un élément de la danse,
un
aspect de la danse du Soi.
Une vague parmi les vagues.
Reste
fermement ancré dans la conscience,
dans le réel,
dans ce que tu es
vraiment,
une fois que tu en as eu ne serait-ce qu'un seul aperçu.
Mais rester ancré ne peut être le fruit d'un effort.
C'est le fruit
d'un total relâchement,
d'une absence totale d'effort,
puisque c'est
plus près de toi que ce que tu es,
plus près de toi que le chat que
tu caresses,
plus près de toi que ton propre souffle,
plus près de
toi que ton propre corps.
Ton corps est encore un objet.
Ton souffle
est encore un objet.
Ce que tu es n'est pas un objet.
Ce que tu es
est cette absence d'objet,
donc cette absence totale,
qui est en fait
présence absolue.
Voilà le mystère,
le paradoxe ultime
de
l'évidence absolue d'Etre.
Tu es la Vie,
tu es l'essence de la
Vie.
Qui s'exprime totalement librement
à travers des corps,
à
travers tout ce qui apparaît.
Tu n'es rien de particulier,
tu es la
totalité de tout ce qui est ;
il n'y a rien qui te soit
étranger,
rien que tu ne puisses être.
Alors ?
En quoi la disparition d'un corps
- le tien, celui d'un être cher -
peut-elle troubler ce que tu es ?
En quoi la disparition d'un
quelconque objet
peut-elle troubler l'ultime sujet ?
Au fond, il
n'y a même pas d'objet qui disparaisse,
il n'y a qu'une apparence
d'objet qui disparaît,
qui n'est absolument pas perdue,
ni à
travers le temps, ni à travers l'espace.
Rien n'est perdu dans ce
flux infini de la Vie que tu Es.
Dans ce flux infini de conscience.
Dans ce mystère absolu du rien qui contient le tout,
ce rien de la
conscience
contenant le tout apparent de la matière.
Tu
es ce silence,
cette lumière,
cette paix,
cet amour,
cette joie sans
objet,
sans contraire,
immuable,
permanente.
Dès que tu lâches
l'objet auquel tu t'identifies,
ou la somme d'objets auxquels tu t'es
identifié ;
dès que tu lâches l'objet,
alors cette glorieuse absence
que d'aucuns appellent Dieu,
qu'on peut
appeler tout simplement l'Etre, le Soi,
d'une
infinie façon,
cet indéfinissable silence,
resplendit.
Alors
tu découvres
cette souveraineté absolue
qui jamais ne t'a échappé,
car elle est l'étoffe même de ce que tu es.
Pas seulement l'étoffe
de tes rêves.
L'étoffe même de ce que tu es,
bien réellement.
05.07.12
Le tableau est de Christine Morency, peintre de la malice, de la fraîcheur enfantine et de l'émerveillement de l'Eveil.
L'Inéffable merveilleusement mis en mots ... :-)
RépondreSupprimerUn ineffable Merci, Delphine ! ;)
RépondreSupprimerMagnifique, merci Rodolphe :-)
RépondreSupprimerMerci, Christelle ! :)
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